What am I looking for ?
...Almost Everything...

Rien ne pourra les remplacer. Elle tient à eux plus qu'à quiconque et est prête à tout pour leur venir en aide. Ne pas savoir ce qu'ils sont devenus depuis le déluge est une véritable torture pour elle, bien qu'elle n'en montre rien, et c'est pour les retrouver, ou au moins savoir ce qui leur est arrivé, qu'elle fait tout pour trouver un moyen de rendre à la Terre son aspect d'origine.

L'arrière-grand-père, premier arrivé sur le sol américain, celui qui avait tout pour réussir, et qui a tout perdu... Cassie ne sait pas exactement comment la famille a pu perdre sa fortune, elle sait juste que sa mère a du faire face à leur changement de statut social, assez difficilement à vrai dire, et que ça a été pire encore pour ses grands-parents, bien qu'elle les ait peu connus. Un portrait de lui tronait pourtant encore dans l'appartement de ses parents, au-dessus de la cheminée. Maman ne cessait de répéter qu'après tout, sans lui, elle n'aurait pas rencontré son mari...

Elle tient sans doute de son père son caractère entier et passionné, prêt à tous les sacrifices pour parvenir à son but, même au prix de sa propre santé. De son enfance, elle se souvient surtout de l'avoir attendu le soir, comme il rentrait toujours très tard après des journées de travail titanesques. Il la met régulièrement en garde, puisqu'il se rend bien compte qu'elle prend le même chemin que lui, et qu'il est conscient, à présent, qu'à trop tirer sur la corde, on finit par se faire du mal soi-même. Mais elle n'est pas tout à fait prête à l'écouter, et si elle répond que tout ira bien, et promet de faire attention, elle ne change pas vraiment ses habitudes...

Se mère, son modèle en quelque sorte. C'est une femme aimante et attentionnée, et Cassie s'est souvent identifiée à elle, alors qu'on la comparait bien plus souvent à son père, sans doute pour le côté scientifique qu'ils partageaient. Maman, c'était l'artiste, et pour ça, elle l'admirait énormément. L'admire toujours, d'ailleurs, même si elle ignore si elle est toujours en vie. Elle a beau ne pas les suivre très souvent, elle est consciente que ses conseils valent de l'or... mais ses passions prennent bien souvent le dessus, au détriment de sa santé.

Son frère jumeau. Pourtant très différents dans leur façon d'être, ils étaient inséparables. Presque fusionnels pendant les cinq années où ils étaient les seuls enfants de la maison, ils ont quelque peu transposé le couple parental entre eux, Dae, l'artiste, restait plus en retrait, mais était prêt à défendre les petits par les poings s'il le fallait dans la cour de récréation, et Cassie prenait le rôle de la maman couvant ses petits. Il les protégeait, elle pansait les petits bobos, aux genoux ou à l'âme. C'est vers lui uniquement qu'elle se tourne lorsqu'elle a besoin de parler, et même ainsi, ses moments de confidences sont bien rares. Pourtant il sait, sans que l'un ni l'autre ne puisse vraiment l'expliquer, lorsqu'elle ne va pas bien, qu'elle le dise ou non. Et inversement. Elle est persuadée qu'il est encore en vie, quelque part, même si elle n'en a aucune preuve. Elle est certaine qu'elle le saurait, sans pouvoir expliquer pourquoi, s'il avait péri pendant le déluge. Et c'est peut-être ce qui lui donne aussi la force de continuer : s'il est en vie, il est certainement avec les autres, il ne les aurait pas abandonnés.

Son petit frère, cadet de cinq ans. Il était parti pour faire une grande carrière de sportif, disait-il, ne jurant que par le baseball. Sa carrière a plutôt tourné vers le coaching, comme une blessure au genou lui a interdit l'accès aux championnats nationaux. Il devait sans doute être sur le terrain avec ses joueurs au moment de la catastrophe, elle espère juste qu'ils ont pu trouver refuge quelque part, avant qu'il n'ait été trop tard.

Sa petite soeur, cadette de sept ans, prof de gymnastique dans un foyer pour enfants à . Elle venait tout juste de se marier, l'an dernier, avec le professeur de danse du même foyer. Ils voulaient avoir un enfant l'an prochain. 'Tu seras sa marraine, Cassie', lui avait-elle dit la dernière fois qu'elles s'étaient vues. Elle espère de tout coeur que ça puisse vraiment arriver un jour.

Sa petite soeur, âgée de 23 ans. Elle fait encore des études, journalistiques et linguistiques en parallèle, pour allier l'utile à l'agréable, dit-elle : elle espère bien devenir journaliste d'investigation et voyager comme sa grande soeur fut un temps. C'est sans doute parce qu'elle est née si tard que Gaia est très vite devenue la petite protégée de Cassandra, et sans doute aussi sa plus grande fierté. Elle ne l'a pas mise au monde, mais elle l'a vue grandir et s'en est occupée, si bien que c'était un peu comme si elle était aussi sa fille à elle. C'est elle qui, la première, l'a appelée 'Maman Cassie' au grand dam de leur vraie mère, qui a pourtant fini par s'y habituer. Comme pour les autres, elle espère et prie pour qu'elle soit toujours en vie, quelque part.

C'est peut-être parce qu'ils sont parmi les plus vieux ici. C'est peut-être parce qu'ils sont tous les deux passionnés par ce qu'ils font. Ils se sont connus il y a quelques temps déjà, à une conférence sur les modifications climatiques dans le sud de l'Afrique à laquelle ils assistaient tous deux. Elle avait posé un certain nombre de questions, et il était venu la trouver, à la fin, pour lui en poser quelques-unes à son tour. Manifestement, ses questions révélaient sa connaissance du terrain, d'après ce qu'il lui avait dit, et il souhaitait en savoir un peu plus, car il n'avait pas eu l'occasion, pour sa part, de sortir bien souvent de son laboratoire. "Vous ne savez pas ce que vous perdez", lui avait-elle répondu en souriant, et ils avaient discuté géologie, climatologie et expéditions diverses et variées autour d'un café. Elle était repartie pour San Francisco, il avait regagné son labo. Et quelques semaines plus tard, son patron lui avait indiqué qu'un laboratoire New Yorkais souhaitait la débaucher. "C'est une occasion en or pour vous, Miss Evans, bonne chance", lui avait-il dit avant de lui donner congé. Il ne croyait pas si bien dire.
Il faut avouer que travailler avec Jake était rapidement devenu quelque chose de tout à fait naturel. Contrairement à Londres, où elle avait eu plus de mal à prendre ses marques, il n'avait pas fallu quinze jours pour qu'elle comprenne comment il fonctionnait. Et inversement. Elle le considère aujourd'hui comme un ami, et on peut sans doute voir une pointe de tendresse dans son regard, lorsqu'elle pose les yeux sur lui. Elle apprécie son calme et son professionnalisme et a appris à décrypter dans son attitude ce qu'il ne dit pas toujours. Et au moindre signe d'agacement, elle prend le relais pour répondre aux collègues parfois un peu... disons en dehors des limites de l'acceptable, ou pour expliquer les remarques parfois sibyllines qu'il peut lui arriver de faire.

Si on lui demandait, elle répondrait qu'elle est persuadée que le jeune homme ne l'apprécie pas beaucoup, parce qu'elle passe son temps à le remettre à sa place lorsqu'il dépasse les bornes avec les autres laborantins (ce qui arrive assez fréquemment, il faut bien l'avouer). Elle est consciente qu'il n'a pas eu une enfance particulièrement facile, mais a tendance à penser que tous autant que nous sommes, nous avons eu des passages plus ou moins agréables dans notre vie, et que ça n'excuse pas tout. En tout cas, clairement pas son comportement asocial, qui, à son sens, ne résoudra rien, bien au contraire. Si on lui disait qu'au contraire, Adam est plutôt content de ses remarques, elle ouvrirait grands les yeux de stupeur, puis sourirait : tant mieux, elle ne cherche absolument pas à le braquer, simplement à lui faire comprendre les choses.
Au demeurant, elle est tout à fait consciente de ses qualités en tant que scientifique, et n'hésite pas à le solliciter si nécessaire, lorsque quelque chose lui résiste.

On ne peut pas vraiment dire qu'il y ait grand chose pour lier les deux femmes, de prime abord. Et pourtant, malgré leurs modes de pensées radicalement différents, elles s'entendent plutôt bien. Il faut dire que Cassie met un point d'honneur à ne pas juger les gens trop hâtivement, et que, passé ses moeurs quelques peu discutables, et sa propension à dire tout ce qui lui passe par la tête, au mépris des conséquences, il y a eu quelque chose lors du déluge - dans son regard peut-être ? - qui a fait douter la scientifique. Et à force de discuter avec la jeune femme, et malgré les carapaces dont celle-ci se couvre, elle a fini par percer quelque peu cette armure, ou plus exactement, à entrevoir ce qui pouvait se cacher derrière ses fissures. Il faut dire que si elles restent très différentes, elles ont au moins ça en commun : taire leurs propres maux, les dissimuler, chacune à sa manière, tout faire pour ne pas les révéler aux autres. Elles fonctionnent comme ça, toutes les deux, et sans doute est-ce une bonne part de ce qui les rapproche. Et puis Anna a sans doute compris, avec le temps, qu'elle pouvait faire confiance à son aînée, et que rien de ce qu'elles pouvaient se dire ne parviendrait aux oreilles de quiconque ni ne serait utilisé contre elle.

En quelque sorte nounou attitrée du petit Narcisse - au moins quand Tom n'est pas disponible - Cassie a bien longtemps cru qu'elle ne pourrait jamais parvenir à aborder son collègue, particulièrement discret. C'est qu'il est très réservé pour sa part, et qu'elle n'a pas l'habitude de forcer les gens à lui parler, persuadée que les confidences doivent venir d'elles-mêmes et qu'il ne sert à rien de forcer les choses, sinon à brusquer les gens. Il aura fallu un déplacement du papa en dernière minute et l'indisponibilité de l'ami qui s'occupe de son fils d'ordinaire pour qu'il en vienne à lui adresser la parole davantage que les convenances d'usage entre collègues. Et à lui confier son trésor. Une marque de confiance qu'elle n'était pas prête d'oublier, d'autant que le petit bout de chou plein de vie lui rappelle d'autres enfants, bien grands maintenant, qu'elle a pu aider à élever par le passé.
Il paraît qu'elle est devenue une des baby-sitter préférée de Narcisse, ce qui illumina son visage d'un sourire lorsqu'il le lui annonça. A défaut d'avoir ses propres enfants, elle s'occupe du mieux qu'elle peut de ceux que les autres lui confient, et ce genre de remarque reste à ses yeux la plus belle récompense qui soit. De fil en aiguille, de dépannage de nounou en discussions professionnelles, un certain lien s'est créé entre les deux collègues, et Asty a fini par lui expliquer comment il en était venu à s'occuper seul d'un enfant si jeune. Et si sa première pensée concernant la mère déserteuse n'a pas été très glorieuse, sa rencontre inopinée avec celle-ci lors du déluge vint rapidement la balayer...

Dans un labo fermé de tout contact avec l'extérieur, on ne peut pas ignorer les gens qui nous entoure. Et encore moins lorsqu'il s'agit d'un médecin. Pas quand on s'appelle Cassandra. Il lui est arrivé, quelques fois, de trainer un de ses collègues jusqu'à elle, ou au contraire, de la trainer jusqu'à un de ses collègues. Bon gré, mal gré, la jeune femme a fait son travail, et pour ça, Cassie lui est reconnaissante. Il n'y a rien qu'elle supporte moins que de voir ceux qui l'entourent blessés, physiquement ou moralement, et la situation actuelle ne permet pas vraiment d'éviter la souffrance morale, alors elle fait tout pour éviter les blessures physiques, ou en tout cas, les panser au plus vite. Et pour ça, l'aide de Jade lui est particulièrement précieuse.

Une des dernières personnes à avoir passé la porte du labo et pour cause. Cassie allait refermer, la déferlante se rapprochant bien trop pour qu'elle put faire autrement, quand elle entendit des pas, un cri, un choc. Une brunette venait de s'assommer, alors elle était ressortie pour aller la récupérer en vitesse - on n'aurait pas dit comme ça, mais c'était qu'elle avait un minimum de force, notre petite scientifique, et l'adrénaline devait aider pas mal aussi - et ce fut la dernière personne qu'elle put sauver de la noyade.

Ce qu'elle sait, c'est qu'il ignore si sa femme et son fils sont encore vivants, et qu'il tient le coup, malgré tout, gardant espoir à sa manière. Ce qu'elle sait, pour l'avoir surpris, c'est qu'il écrit des lettres qui ne partiront peut-être jamais, auxquelles il n'aura sans doute jamais aucune réponse. Loin de trouver ça pathétique, elle comprend sa démarche : l'écriture est un moyen comme un autre d'extérioriser ses sentiments. Et bien loin de remuer le couteau dans la plaie ou de faire remarquer quoi que ce soit au sujet de ces missives qu'il s'empresse de dissimuler dès que quelqu'un arrive, elle fait mine de n'avoir rien vu, de ne rien savoir. Un de ses principes est de ne jamais forcer les gens à parler, elle l'applique avec Bobby comme avec les autres, l'ayant simplement assuré de sa disponibilité s'il venait à avoir besoin d'une oreille attentive.
Ce qu'elle ne sait pas, en revanche, c'est que son comportement l'insupporte, pour la simple et bonne raison qu'elle s'oublie dans l'histoire, et que si elle en est parfois consciente, mais ferme les yeux pour ne pas voir ce qu'elle ne souhaite pas réaliser, elle n'est pas la seule à s'en rendre compte. Mais il a du pain sur la planche s'il espère pouvoir un jour la faire changer...

Il y a des gens qu'on préférerait ne pas avoir rencontrés, qu'on regrette d'avoir cherché à sauver. Elle avait ramené Kris, in extremis, à l'intérieur. Le déluge avait tout emporté, ou presque... Un corps inerte, elle avait appelé Jake à l'aide, incapable de porter deux jeunes femmes inconscientes par elle-même. Deux jeunes femmes qui avaient fini par rouvrir les yeux, miraculées. Abby était la seconde, et il arrive parfois que Cassie se surprenne à songer qu'elle n'en serait pas là si elle ne s'était occupée que de Kristen.
Parce qu'Abby fait partie de ces gens qui vous ressemblent à tel point qu'on ne peut s'empêcher de faire la comparaison, et quand on s'appelle Cassandra Evans, il est assez rare qu'une telle approche soit positive pour soi-même. Entendons-nous bien, Cassie n'est pas particulièrement peu sûre d'elle, mais elle garde un oeil critique sur elle-même, peut-être même trop critique, et est bien plus indulgente envers les autres. Renvoyez-lui un semblant d'elle-même vis-à-vis de laquelle elle sera moins dure qu'avec elle-même, et forcément, la balance penchera en faveur de l'autre. C'est ce qui se passe avec Abby Swan.
Du peu qu'elle a pu comprendre, la jeune femme a eu un cursus quelque peu similaire - à Yale, elle, et non Harvard - puisqu'elle est géologue de formation, a une certaine expérience du terrain, acquise avant qu'elle ne se voie offrir un poste de professeur, et a une certaine tendance à materner tout le monde autour d'elle, tout comme la climatologue peut le faire de son côté. Le hic, c'est que la rescapée a tendance à vouloir appliquer ça aussi sur Cassie, et que la jeune femme n'est pas vraiment prête à écouter les conseils de celle qui, à ses yeux, lui pique sa place.
Alors certes, elle reste neutre, et garde pour elle son ressentiment. Certes, elle est toujours à l'écoute si la jeune femme vient lui parler, mais elle ne peut s'empêcher, au fond, de considérer la future maman comme une rivale - qui a la joie de pouvoir fonder une famille, elle - contre laquelle elle a bien du mal à lutter.

...Les disparus du forum...

La jeune femme venait juste d'entrer dans le labo quand Cassie, alertée par ses collègues et par ce qu'elle voyait elle-même, avait poussé à l'intérieur ceux qu'elle avait pu récupérer au dehors et barricadé la porte derrière elle. Pendant une ou deux secondes, elle s'était sentie au bord des larmes, à cet instant, comme elle réalisait alors qu'elle ne pouvait rien de plus pour ses proches, qu'elle ne les reverrait peut-etre plus. Elle avait fait face parce qu'il y avait les autres, ces inconnus qui se retrouvaient prisonniers d'un monde scientifique qu'ils ne connaissaient pas forcément, et elle s'était efforcée de les soutenir, consciente que leur situation à tous était délicate, mais que eux, collègues, avaient un avantage certain : ils se connaissaient. Et elle avait tenté de combler ce fossé, en discutant de temps à autre avec chacun des 'intrus' parachutés ici avec eux.
Dans l'absolu, Cassie n'est pas vraiment très en phase avec l'abandon d'enfant... Evidemment, elle est consciente que tout le monde n'a pas toujours le choix, qu'il y a des situations où c'est laisser une chance à son enfant que de ne pas l'élever soi-même, pour ne pas lui ruiner sa vie, mais avouez que racontée comme elle peut l'être, la vie de Lunàh ne donne pas vraiment l'impression que l'abandon était la meilleure solution, n'est-ce pas ? Elle avait quelqu'un pour l'épauler, heureux d'être le père de son enfant, on a vu pire comme situation désespérée. D'autant qu'au fond, la météorologue est persuadée de ne jamais obtenir cela un jour - et peut-être est-ce pour ça que l'abandon et l'avortement lui sont assez difficiles à accepter à moins de très bons arguments : il lui semble qu'il a toujours fallu choisir entre la vie sentimentale et la réussite professionnelle, et elle était incapable d'abandonner la recherche pour ça, ce qui fait qu'elle envie celles qui ont une vie de famille épanouie. Et pourtant, il y a quelque chose dans le regard de la jeune femme qui a presque tout de suite attendri la petite maman du laboratoire. Ou peut-être est-ce parce que la blonde lui renvoie en miroir ses propres inquiétudes, comme elle ne sait pas elle non plus ce que sont devenus ceux qu'elle aime ?